RE-NOIR(S)
"Fin de l'été, une équipe de télévision achève la réalisation d'un documentaire sur le peintre Auguste Renoir. Les dernières scènes du film doivent être tournées en plein air, et montrer l'artiste au travail.
Alors que commence le tournage de ces dernières scènes, de violents orages viennent interrompre le travail. Obligés d'attendre le retour d'une éclaircie continuer, l'équipe s'installe pour quelques jours dans une petite auberge... De cette attente forcée naîtront rivalités et conflits au sein de l'équipe.
De son coté une jeune femme (actrice de théâtre en vue), venue passer quelques jours à la campagne, a loué une chambre dans la même auberge. Elle va donc assister aux tensions et aux disputes qui éclatent au sein de l'équipe. Elle fait aussi la connaissance d'un vieil homme et d'un enfant qui passent ces journées pluvieuses à reconstituer un puzzle.
Sur cette trame se tisse les histoires des autres personnages de l'auberge..."
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L'histoire est une fiction, la fiction est un récit, le récit un emboîtement de scènes, de situations, de lieux... Le récit est une boite où se cache une autre boite, laquelle en renferme une infinité d'autres...
Voix 1
On est en août. Il fait beau. En quittant le périphérique j’ai éprouvé une certaine inquiétude. Je n’étais jamais allé du côté du vert. Ca fait des années que je n’ai pas quitté Paris. Quand Jean-Marie m’a dit qu’on allait passer huit jours au vert « pour finir le travail », je dois dire que j’ai un peu tiqué. Après tout était-ce bien nécessaire ? Bon mais J-M y tenait vraiment. Il a dit que ce serait mieux de le faire en vrai. En fait c’est surtout quand il a ajouté : « Tu verras, toi le citadin, ça va te changer d’air ! » que ça m’a inquiété. Changer d’air ? J’ai l’air de quoi ?... J’ai pas voulu répondre parce que je sais qu’il m’aurait encore charrié sur ma grise mine des lundis, mon teint pâlichon et mon éternel parka.. même au mois d’août… Et puis, il y avait cette fille qui devait venir aussi.
J’ai pas voulu faire le malin… Bon, et voilà, on était en route pour un bled paumé du côté de… de quoi déjà ? … Bof !... J’étais à l’arrière de la camionnette assis à coté de Raymond qui ronflait déjà. Ha celui-là ! Je regardais défiler les bords de route en m’en tenant au rail de sécurité. Sur les genoux j’avais mon Nagra qui tournait. Mon plaisir et mon job c’est de capturer des sons…
Voix 2
Voix 3
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Notes de tournage
Noir. (on entend de l’intérieur le bruit du moteur d’un véhicule qui roule / changement de vitesse ). Des halos jaune ponctuent (balayent) le noir.
Sortie d’un tunnel (l’image est prise depuis l’intérieur d’un véhicule à l’arrière : jour (beau temps) / paysage sub-urbain (périphérique) qui défile
montage cut sur les voitures qui doublent sur la voie de gauche.
Visage renversé d’un homme qui dort sur la banquette arrière.> vues du périphérique toujours depuis le véhicule. Des mains posées sur un appareil enregistreur (type magnétophone à bande (les aiguilles de contrôle du vu-mètre battent la mesure du clignotant).
[…]
(depuis la place arrière et les places avant) : paysages de campagne : bords de route avec plans filés. > Dans le rétroviseur de droite (vu depuis la place arrière) un fragment de visage d’une jeune femme, puis le profil du conducteur.
Profil de la jeune femme dans la voiture. Coup d’œil du conducteur dans le rétroviseur intérieur. On voit deux passager à l’arrière. L’un dort tête en arrière (bouche ouverte), l’autre penché en avant redresse de temps en temps la tête vers la vitre…il a un casque sur les oreilles.
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Première partie
1 – a
Dans le hall de l’hôtel, Raymond et Fabien déposent les sacs et une partie du matériel Jean-Marie règle les formalités. Dans un coin, col levé jusqu’au menton, Lucie jette un regard circulaire sur la pièce. Elle s’approche d’une porte vitrée entrouverte qui donne sur une salle adjacente : un homme derrière le comptoir d’un bar, quelques hommes attablés qui tapent le carton, deux jeunes secouent un flipper dans un coin.
L - (à J-M, qui vient la rejoindre pour lui donner les clés de sa chambre)… Et ben dis-moi, c’est gai la campagne !
F-
J-M – Allons ! Une bonne douche et on va faire un tour du côté de la rivière…
L- Sous la pluie ? Non mais tu plaisantes j’espère… ?
R- Cher mademoiselle, apprenez que cet homme là n’a pas le sens de l’humour.
F- Sortez les cirés !
La dame de l’auberge – Au fait !...Nous ne servons pas de repas le soir… Mais je connais un très bon restaurant…
J-M – Ha merci !
La dame – …pour les bagages ça va aller ou faut-il que j’appelle Bernard… Heu.. je veux dire le patron…
F – On se débrouille madame ! Merci
J-M – Raymond et Fab : chambre 6… au premier. Tenez Lucie vous avez la 18 et moi la 19… deuxième côté jardin.
F – Il va falloir que dorme avec lui ?
J-M – Oui, pour cette nuit seulement, il n’y avait plus de chambres disponibles.
F – Putain ! Mais c’est qu’il ronfle… t’as bien entendu en venant ?
R – … c’est pour ça qu’on fait chambre à part avec ma femme.
Au palier du second
L – (à J-M) – Le pauvre
J-M – Vous voulez dire la pauvre ?
L – Non pourquoi ?
J-M – …je pensais à sa femme !
[…]