Atelier de la condamine (histoires de palettes)

Publié le par ap

Dans les trois ateliers de Bazille on trouve, comme il se doit, la présence de palettes. Rarement cependant leurs emplacements respectifs et donc leurs significations ne semblent être laissés au hasard.

Atelier de la condamine (histoires de palettes)

Dans l’atelier Rue Visconti, la palette occupe une place de choix puisqu’elle est disposée en amorce sur la partie gauche du tableau. Installée sur les pieds d’un chevalet sur lequel est fixé un tableau encadré dont on ne voit que la tranche, il signale que l’ouvrage est cours. Bariolée, la palette peut indiquer (si il s’agit bien de la toile qui la surplombe) l’état d’avancement du travail.
De la palette, aux peintures accrochées aux murs, il y a toute l’histoire de la peinture qui s’écrit, du chaos des pigments mélangés à l’organisation de ceux-ci.

Atelier de la condamine (histoires de palettes)

 En analysant succinctement la gamme chromatique du tableau on s’aperçoit d’ailleurs que celle-ci est contenue dans la palette. A noter que c'est la même palette que celle qui figure dans son autoportrait de 1866.

Pour l’atelier de la rue Furstenberg c’est un autre sens que désigne la palette posée en équilibre sur la boite de couleur laissée ouverte sur le sol. Cette palette, contrairement à celle de la Rue Visconti, est rectangulaire. Dans l’œillet où le peintre introduit habituellement son pouce pour tenir cet objet, sont fichés des pinceaux. Le tout donne l'impression que le peintre a laissé ses instruments en plein travail.
Les tonalités de la palette sont nettement moins visible, néanmoins elles contiennent plus de vert et de jaune. Tous ces indices (forme de la palette, boite, tonalités…) permettent de comprendre qu’il s’agit là d’un matériel de campagne (de plein air) et non celui d’un atelier. Au demeurant le seul chevalet visible (posé contre le mur à côté du sofa) est bien une sauterelle et non un support stable d’atelier. Le tabouret à trois pied et au siège incliné (près de la table) achève l’équipement.
 
Atelier de la condamine (histoires de palettes)

Aux murs, la présence de nombreux paysages peints (7 pour 3 portraits ou figures et 1 bouquet), confirment une importante activité de plein air. Etrangement cette petite palette d'apoint est représentée sur le portrait de Bazille par Renoir (1867) alors que celui-ci peint la nature morte aux faisants.
L’atelier Rue de la Condamine contient deux palettes. L’une, nous l’avons déjà vu, est entre les mains de Bazille et l’autre est accrochée à un clou, sur le conduit de la cheminée, au-dessous d’un bouquet vraisemblablement peint par Renoir. La première est chargée de pigments et l’autre nettoyée.

Atelier de la condamine (histoires de palettes)

Celle tenue en main nous indique, soit que le peintre était au travail lorsque ses amis lui ont rendu visite, soit que sous les conseils de l’un ou de l’autre de ses visiteurs (Manet?) il a pris sa palette pour retoucher le tableau devant lequel il se tient. Celle qui se trouve au mur (trophée ?) indiquerait peut-être alors, par défaut de couleur, l’absence de travail.
Chose amusante, enfin si l’on peut dire, c’est la toile de Renoir qui est au-dessus qui mime par le jeu des touches rapides l’état d’une palette.

Enfin, comme rien n’a sans doute été laissé au hasard dans la mise en scène de ce tableau, je ne peux m’empêcher de voir dans cette palette vide une sorte de signe discret, que j’interprète (un peu hâtivement il est vrai) comme celui de la cessation annoncée de son activité de peintre.

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